dimanche 24 novembre 2019

Ni roi, ni chantre.

S’ils n’entendent rien, s’ils n’écoutent rien, j’écoute et j’entends le râteau sur les pierres. Pendant qu’ils s’épuisent à dire non, qu’ils refusent le partage et la compassion, humblement et une à une, je ramasse des feuilles sèches sur le gravier. Je dis au ciel pendant que le vent s’épuise, la

chanson lente, toujours lente, du râteau sur les cailloux, fleurs roses et feuilles vertes, je joue au bleu dans l’air qui souffle, vent épuisé, un fardeau de feuilles. Je coupe et je taille, coupe et recoupe, toujours on nettoie, pour entendre sur le sol, le gravier, le son du râteau qui tinte. Voici

la coupe, voici l’île et j’attends le prochain bateau, provençal revenu de Catalogne, le port est ouvert, et chante aussi : voici la coupe, où est-il ce grand peuple fier et libre. Bien sûr nous en sommes à la fin, si les parleurs s’épuisent, ce peuple ne s’en relèvera pas, ils parlent, ils parlent, ils refusent

les mains tendues, ils espèrent la rencontre et l’idée, oh, l’idée, se battre et châtier l’ennemi, un grand peuple fier et libre, qui pleure, qui pleure et ne veut rien devenir, une hymne perdue, tout résumé à celui qui s’acquitte, la main à la poche, le cœur sous la main, et la chanson lente, lente,

toujours lente, des droits et des devoirs, du prêté et du rendu, de la remise, des marchands, leurs achats et leur honneur, un grand peuple fier et libre, si effarouché, effarouché, servi petit, déposé loin, triste et finissant, finissant, plus rien ne parle, les livres seuls à peine ouverts et jamais

lus, bien mal, bien mal compris, la chanson lente, lente, toujours lente, des droits et des devoirs, voici le port, voici l’île, voici la coupe et puis voici un cœur, on disait qui bat, qui bat, je sens mon cœur qui bat et ne sais plus pourquoi, il bat. Il battait pour vous, pour tous, plus rien n’existe et

plus rien n’avance, ni Rois Mages, ni Pharaons, tout y courait et tout y était, dans le pays de ce grand peuple, fier et libre, les mangeoires, les scintillants et les sucres au bout des branches, le Christ Roi et les serviteurs d’autres mondes, Égypte et Orient, tout s’y remet et tout échappe

plus rien ne compte, un mot, un mot, il faut payer, payer et tout compter, plus rien n’est mis en partage, plus d’or, d’encens, de myrrhe, un peuple de prêtres, un peuple de rois, un peuple de fils et de chantres, tous se meurent et s’oublient, ils sont perdus, ils sont absents. Autour de la mangeoire,

les présents, chacun s’en vient et tout est compté, tout nous ferait rois, un jour dans le ciel pur, dans l’ombre bleue. Si tombent les oracles tombera notre nation, paroles mortes et mortes saisons, la chanson lente, lente, bien lente, ils s’épuisent et disent non, je ramasse des feuilles sur le gravier.

01 Août 2013.

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